Auteur de romans et d'essais, Hubert Haddad est d'origine maghrébine et a obtenu le prix des Cinq Continents de la Francophonie pour le même livre, en 2008 .
L'action se passe sur la ligne verte et le long du mur entre Israël et la Palestine et nous est relatée dans le style haletant, plein d'urgence du récit du guerre plein de dangers. Le héros est Chaim ,soldat israélien frappé d'une balle dans une escarmouche entre soldats de Tsahal et militants palestiniens. Le blessé qui aurait dû être un otage , devient amnésique et est sauvé par ses agresseurs palestiniens qui le soignent . Résultat : il ne se souvient plus de son origine, ni juif ni arabe, et il est est alors confié à une famille de femmes palestiniennes dévouées qui le prennent pour leur fils disparu, un certain Nessim . Le voici devenu Palestinien en quelque sorte, et il est même entraîné pour devenir un kamikaze( ce qu'on appelle communément un fou d'Allah) et transféré à Jérusalem clandestinement .
L'otage Chaim qui a été recherché par tout le monde, Tsahal , le Fahta, le Hamas et ses propres ravisseurs a été caché sous le déguisement le plus facile dans cette région, celui de terroriste Palestinien, mais le nouveau Nessim ne comprend pas vraiment ce qu'on attend de lui : il est dans le brouillard .Voilà une critique à peine voilée des Palestiniens et de leur insupportable politique de violence entre factions rivales et concurrentes, qui se trompent de cible , critique à laquelle on ne s'attendait pas d'ailleurs. Bref, la malheureux Nessim déstabilisé par le mort de sa « mère » palestinienne , recherche dans la vieille ville un certain Omar, qui va lui donner des directives ; celui-ci l'équipe d'une »une ceinture d'explosifs et l'envoie faire sauter un bus en plein Jérusalem . On devine le topo : le voici maintenant affublé en soldat juif et muni de son ancienne identité israélienne sans le savoir ; il s'appelle de nouveau « Cham » . On croit rêver ,intrigue invraisemblable et rocambolesque, mais on y croit sans discerner le faux du vrai.
Cette horrible métamorphose de la perte de mémoire dans la pire guerre fratricide du Moyen Orient donne à penser ; pouquoi est- ce que le lecteur marche ? Disons-le tout net : le langage parlé des militants hystériques sous pression , se croyant tous investis d'une mission divine est communicatif à cause de l'automatisme induit par l'action terroriste immédiate : on ne questionne plus rien et on suit le cours des choses , en terroriste sous influence … Le héros sauve son âme quand même , car il est reconnu en dernière minute par une vieille copine qui grimpe dans le bus et lui parle ,sans se douter de son aventure, de son frère disparu .. Le voile se déchire brutalement et la mémoire lui revient… Non, il ne se fera pas sauter .
Il reste un récit superbe, tragique, au bord de l'abime et frappant par la nullité des ces actions atroces qui s'annulent l'une l'autre ; au milieu d'un paysage campagnard et urbain, démoli et silencieux, la nuit bleue orientale tombe sur la cabane où l'otage s'est refugié.