Depuis « La Chambre des Officiers »et surtout « La Malédiction d'Edgar » livre fascinant sur le chef du FBI pendant 50 ans Edgar Hoover, on attend de Fugain un roman de complots, de secrets et de perversité politique ou autre bien rôdée. Ce livre-ci ne déroge pas à ces attentes quoique le sujet soit un théme éculé et dont on a vraiment s tout révélé : le nazisme et ses camps d'extermination. Au début on ne se doute de rien et on lit l'histoire incroyable de cette fille Maria, de 15 ans sauvage, abandonnée dans un ferme vide en Allemagne occupée et découverte par un bataillon français,qui va la sortir de ce taudis , la nourrir et la ramener à la santé. Cette première partie évoque la souffrance et le dénuement absolu du peuple allemand en 1944 quand les bombardements incessants des alliés leur tombent sur la tete et la pitié vous saisit. Du gain peint aussi les hommes et officiers français qui périssent d'ennui et tournent en rond dans cette ville dévastée et sans activité . La vie de caserne est terrifiante et leur chef un capitaine Louyre se cherche une énigme à résoudre dans cette Allemagne muette qui, ne parle pas du Führer ni de la Gestapo ni des prisonniers..qu'est devenue la mère, malade mentale enfermée de la petite Maria, et surtout qu'est devenu l'Hôpital de la ville ?
Une enquête mène au médecin chef du fameux hôpital maintenant à la retraite et on découvre toute la théorie nazie de l'élimination des malades mentaux,des handicapés, prisonniers malades etc qu'ils appelaient pudiquement des « morts par faveur « , car tous ces malheureux n'avaient qu'un envie : mourir. Ils furent déportés par trains entiers , et personne ne s'y opposât. La narration est sobre, claire , ressemble à un documentaire et Dugain réussit l'exploit de faire revivre sans ennuyer les lecteurs qui connaissent ces évènements, un passé dont les allemands survivants n'ont ni honte ni remords . le maire et le médecin de la ville admirent encore leur Führer et pour eux, la grande Allemagne victorieuse ne peut avoir été battue par les Alliés . Non ils ne croient pas encore à leur défaite.Elle est impossible et leur psychose continue.
Récit terrifiant et sans fioritures, le capitaine Louyre, après ces découvertes macabres, demande à être démobilisé et quittera l'Allemagne, tout comme le lecteur déboussolé préfère penser au salut de Maria, orpheline abandonnée qui part en France avec le capitaine vers une vie plus humaine et un pays moins dévasté que l'Allemagne.